Alcool et diabète

L’alcool se trouve partout: dans les réunions de famille, les pique-niques et même à proximité des terrains de sports. L’alcool n’est jamais difficile d’accès. Mais est-ce souhaitable de vous en approcher? Oui, en autant que votre diabète soit bien contrôlé, que vous n’ayez pas de complications et que vous soyez bien informé des risques particuliers que posent l’alcool sur les personnes atteintes de diabète de type 1 ou de type 2.

Votre corps et l’alcool

Les lignes directrices de pratique clinique 2003 pour la prévention et le traitement de diabète au Canada recommandent aux personnes diabétiques une consommation restreinte d’alcool :

Femmes :

fleche Au maximum, une consommation par jour
fleche Un maximum de 9 consommations par semaine

Hommes :

fleche Au maximum, deux consommations par jour
fleche Un maximum de 14 consommations par semaine
Une consommation d’alcool équivaut à : 340 mL (12oz) de bière ou 45 mL (1,5 oz) de spiritueux ou 90 mL de vin fortifié (du porto par exemple) ou 150 mL (5 oz) de vin sec (rouge ou blanc).
Mais avant d'aller plus loin, informez-vous! À jeun, une grande partie de l’alcool que vous buvez est absorbé directement par votre estomac et dirigé vers votre sang; vous ressentez donc les premiers effets rapidement. Cependant, si vous mangez pendant que vous buvez ou si vous venez tout juste de terminer un gros repas, votre estomac absorbera l’alcool plus lentement. Néanmoins, tout l’alcool que vous boirez entrera dans votre système sanguin; donc la quantité que vous buvez compte toujours.
Les concentrations d’alcool dans le sang atteignent les niveaux les plus élevés entre 30 et 90 minutes après l’absorption. Il est à noter que la première quantité mesurable d’alcool apparaît dans votre sang dans les cinq minutes suivantes. L’alcool est absorbé très rapidement dans le sang sans être détruit ou transformé dans votre estomac. Votre foie fera la plus grande partie du travail de transformation de l’alcool. Mais il a besoin de temps. Pour une personne pesant 75 kg (165 livres), le foie transformera une bière ou un verre de boisson en environ deux heures.
Si vous buvez plus d’alcool que votre foie ne peut en supporter, l’excédent continuera de circuler dans votre sang et sera emmené à d’autres parties du corps. Les cellules du cerveau seront alors spécialement vulnérables.

Les risques d’hypoglycémie

Votre foie emmagasine des sucres sous forme de glycogène. Normalement, lorsque la glycémie descend trop, le foie intervient et convertit le glycogène en glucose et libère ce dernier dans le sang. Cependant, parce que l’alcool est une toxine, le foie veut l’éliminer du sang rapidement. Il lui donne la priorité de transformation. Le glucose habituellement libéré est donc « emprisonné » dans le foie. Cela peut alors affecter le contrôle de la glycémie.
Supposons que vous venez tout juste de disputer quelques sets de tennis. Dans les heures qui suivent votre match, votre corps remplacera l’énergie que vos muscles ont dépensée en retirant le sucre du sang et en l’ajoutant aux réserves des cellules des muscles. L’insuline n’est pas requise pour ce genre d’apport de glucose. Ce processus peut faire baisser le taux de sucre sanguin, à moins qu’il y ait une réduction de la libération d’insuline, que vous mangiez ou alors que votre foie ajoute du glucose à votre sang.
Chez une personne non diabétique, le foie et le pancréas travaillent ensemble pour ajuster le taux de sucre : le pancréas ralentit la libération d’insuline dans le sang et le foie fournit le supplément de glucose. Ensemble, ces processus travaillent à prévenir l’hypoglycémie.
Cependant, quand il y a eu injection d’insuline, cette dernière travaille à éliminer le glucose du sang sans tenir compte de la glycémie. L’insuline ne peut pas détecter ou ajuster le taux de sucre comme le fait habituellement le pancréas. Pour prévenir l’hypoglycémie, vous dépendez du glucose que vous ingérez ou de celui produit par votre foie. Même si vous n’avez consommé qu’un verre d’alcool, votre foie aura plus de difficulté à produire du glucose. Boire aussi peu que 60 mL (2 onces) d’alcool à jeun (la quantité que l’on retrouve habituellement dans un cocktail ordinaire ou une bouteille de bière) peut déclencher une hypoglycémie sévère.
Certaines personnes souffrant de diabète de type 2 qui stimulent leur sécrétion naturelle d’insuline avec des médicaments pris oralement (les sécrétalogues de l’insuline*) risquent elles aussi des hypoglycémies sévères en buvant. Si vous buvez de l’alcool à jeun et que vous prenez des antidiabétiques oraux, vous vous dirigez vers une baisse de votre taux de sucre.
Les diabétiques traités sans médication, de même que les gens souffrant d’embonpoint sévère peuvent être un peu protégés contre l’hypoglycémie lorsqu’ils boivent. Mais attention! l’alcool est un mouton noir lorsqu’elle est mélangée avec la planification alimentaire. Il faut savoir bien l’intégrer.
* Sécrétagogues de l’insuline : Chlorpropamide (DiabinèseMD), Gliclazide (DiamicronMD), Glimépiride (AmarylMD), Glyburide (DiabetaMD, EugluconMD), Natéglinide (StarlixMD), Repaglinide (GlucoNormMD).

Éviter l’hypoglycémie

La meilleure façon d’éviter l’hypoglycémie lorsqu’on boit est d’en limiter la quantité et ne pas boire à jeun. Si vous venez de finir une longue promenade à bicyclette ou une partie de volley-ball fatigante, vérifiez votre taux de sucre avant de consommer de l’alcool et encore au moins une fois pendant que vous buvez. De plus, n’oubliez pas de respecter votre horaire de repas!
Sachez qu’un autre risque de la consommation d’alcool peut être une hypoglycémie retardée. Par exemple, si vous ne mangez pas assez pendant que vous buvez, l’hypoglycémie peut se déclencher jusqu’à 36 heures plus tard!!
Boire peut vous empêcher de vous rétablir d’une baisse de votre taux de sucre. Pour prévenir ce problème, vérifiez votre glycémie si vous avez consommé de l’alcool. Il se peut que vous ayez besoin de prendre une collation supplémentaire avant d’aller au lit. Si vous faites une hypoglycémie, il se peut aussi que vous deviez la traiter plus d’une fois sur une période de plusieurs heures. Réglez votre réveille-matin pendant la nuit pour mesurer votre glycémie.

Hypoglycémie : conseils supplémentaires

  • Boire lentement;
  • Faire des glycémies plus souvent. Ne pas oublier celle du coucher;
  • Prendre une collation supplémentaire au coucher, au besoin;
  • Éviter l’alcool avant, pendant et après une activité physique;
Parce que l’alcool affecte la capacité qu’a le foie de fabriquer du nouveau glucose à partir du glycogène emmagasiné, injecter du glucagon (une hormone qui stimule la production de glucose dans le foie) n’est pas efficace pour une hypoglycémie sévère causée par l’alcool. Vous devriez avoir sous la main une source de glucose agissant rapidement. Si vous perdez conscience, le glucose doit être injecté directement dans votre système sanguin par un professionnel de la santé.
À long terme, un emploi abusif de l’alcool peut diminuer de façon permanente l’aptitude qu’a le foie d’emmagasiner des sucres et de les utiliser pour faire une nouvelle provision de glucose. À ce moment-là, le contrôle du diabète devient plus difficile. D’autre part, vous limiter à une consommation modérée d’alcool avec les repas ne nuira probablement pas au contrôle de votre diabète, mais pourrait nuire au contrôle de votre poids.

Le blues des bedaines de bière

Deux bières légères (faible teneur en alcool) par jour équivalent à environ 150 calories supplémentaires. Cela se traduit par un surplus de 9 kg (20 livres) par année de calories vides, c'est-à-dire qu’elles ne contiennent pas d’éléments nutritifs essentiels! En fait, l’alcool prive le corps d’éléments dont il a besoin, comme par exemple, la vitamine B.
Si vous limitez votre consommation quotidienne de calories, soyez prudent en ce qui concerne votre consommation d’alcool. Pour une alimentation faible en calories, un seul verre peut valoir jusqu’à 10 pour cent des calories allouées pour votre journée. Si vous « dépensez » trop en alcool, vous n’aurez peut-être pas assez à manger; ce qui augmente de beaucoup le risque d’hypoglycémie! De plus, inclure de l’alcool dans votre apport en calories peut vouloir dire que vous déplacez des calories essentielles (nutritives).
Une consommation modérée d’alcool (une ou deux consommations) n’exige pas de modification du plan alimentaire habituel.

Composition en glucides et en alcool de quelques boissons

Type de boisson Quantité (une consommation) Glucides (g) Alcool (g) Kilojoules (Calories)
Bières
Bière (5% alcool) 340 mL (12 oz) 13 14 630 (150)
Bière légère (4% alcool) 340 mL (12 oz) 4 11 400 (95)
Bière à 0.5% d'alcool 340 mL (12 oz) 12-18 1,5 250-355 (60-85)
Boisson au vin (cooler) 340 mL (12 oz) 22 8 700 (170)
Cidre sec 125 mL (4 oz) 3 5 190 (45)
Digestifs
Brandy, cognac 45 mL (1 oz) 0 16 470 (112)
Cherry Brandy 45 mL (1 oz) 15 9 515 (123)
Crème de menthe 45 mL (1 oz) 21 9 615 (147)
Curaçao 45 mL (1 oz) 13 13 600 (143)
Liqueur au café 45 mL (1 oz) 17 13 665 (159)
Spiritueux
Gin, rhum, rye, scotch, vodka, whisky 45 mL (1,5 oz) 0 14 410 (98)
Vins
Blanc sec (11,5% d'alcool) 125 mL (4 oz) 1 12 355 (85)
Blanc moyen (graves) 125 mL (4 oz) 4 11 390 (94)
Blanc mousseux, champagne 125 mL (4 oz) 2 12 400 (95)
Rouge sec (11,5% d'alcool) 125 mL (4 oz) 2 11 355 (85)
Rosé moyen 125 mL (4 oz) 3 11 370 (89)
Vins fortifiés
Porto 60 mL (2 oz) 7 9 380 (91)
Sherry sec 60 mL (2 oz) 1 9 280 (67)
Sherry moyen 60 mL (2 oz) 2 9 300 (71)
Sherry sucré 60 mL (2 oz) 4 9 330 (79)
Vermouth
Sec 60 mL (2 oz) 3 8 285 (68)
Sucré 60 mL (2 oz) 10 8 400 (96)
Source : Manuel de nutrition clinique de l'OPDQ, 2000. Reproduit avec l'autorisation de l'Ordre professionnel des diététistes du Québec.
Voici des informations relatives aux boissons sans sucre, très souvent incluses dans la préparation de cocktail.

Mélanges à boisson sans sucre

Boisson gazeuse sans sucre (« diète ») 280 mL (10 oz) 0 0 10 (3) 0
Eau de Seltz (« Soda Water ») au goût 0 0 0 0
Eau minérale au goût 0 0 0 0
Soda nature (« Club Soda ») au goût 0 0 0 0
D'autres liquides sont utilisés dans la préparation de cocktail. Certains d'entre eux contiennent beaucoup de sucre. Voici des exemples :
Eau tonique (« Tonic Water ») 300 mL (10 oz) = 5 sachets de sucre
Mélange à boisson (« Tom Collins, Bitter Lemon ») 300 mL (10 oz) = 8 sachets de sucre
Boisson gazeuse ordinaire 355 mL (12 oz) = 9 sachets de sucre
Boisson à l’orange (préparée avec des cristaux) 250 mL (8 oz) = 5 sachets de sucre
En ce qui concerne la préparation des repas avec l'alcool, celui-ci s’évapore lors de la cuisson. De plus, la quantité demandée dans une recette est habituellement faible. Pour ces raisons, il n’y a généralement pas de contre-indication à l’utilisation de l’alcool dans la préparation d’un mets.

À mélanger avec prudence

Maintenant que nous vous avons peut-être encouragé à lever le coude, nous allons demander à quelques-uns d’entre vous de le rebaisser. Il y a toujours une attrape! L’alcool peut aggraver certaines conditions associées au diabète. Vous devriez aussi savoir que l’alcool est une drogue et elle peut interagir avec d’autres médicaments. Par exemple, si vous êtes diabétique de type 2 et que vous utilisez une sulfonylurée, l’alcool augmentera son action. Ses effets seront donc de plus longue durée et plus puissants: cela peut conduire à l’hypoglycémie. Parlez à votre pharmacien au sujet des effets de l’alcool associés à la prise de médicaments.

L'effet de l'alcool sur certaines conditions associées au diabète

Neuropathie : L’alcool est toxique pour le système nerveux. Si vous avez des dommages aux nerfs des bras et des jambes à cause du diabète (neuropathie périphérique), consommer beaucoup d’alcool ou même en boire régulièrement, peut augmenter la douleur, la sensation de brûlure, le picotement, l’engourdissement ou les autres symptômes. Des études ont démontré que même une consommation légère (moins de 2 verres par semaine) peut provoquer la neuropathie.
Des chercheurs ont aussi démontré qu’une consommation modérée d’alcool, en plus de permettre un bon contrôle de votre glycémie, en plus de bien contrôler votre glycémie, peut vous aider à éviter la dysfonction érectile causée par des problèmes neurologiques. Si vous souffrez de problèmes gastriques chroniques causés par une neuropathie autonome, tels la diarrhée ou la constipation, sachez que l’alcool agit comme un astringent et qu’il peut irriter le revêtement de votre estomac et de vos intestins. Cela augmentera vos malaises.
Rétinopathie : Dans une étude publiée en 1984 regroupant environ 300 hommes diabétiques, les chercheurs ont prouvé que l’on peut associer une grande consommation d’alcool (3 verres et plus par jour) avec le développement et la progression des maladies de l’œil chez le patient diabétique. Le fait de boire beaucoup augmente la fréquence des hémorragies conduisant à la cécité.
Hypertension : Si vous souffrez d'hypertension, vous pouvez l'améliorer en arrêtant de consommer de l’alcool. Si toutefois vous recommencez à boire, votre pression augmentera. On ne sait pas comment l’alcool peut modifier la pression, mais le lien a été prouvé. Même si vous êtes un buveur léger (moins de 2 verres par semaine), votre médecin peut vous conseiller d’arrêter de consommer de l'alcool pour vous aider à ramener votre pression artérielle à l’intérieur des valeurs normales.
Triglycérides : Plusieurs personnes diabétiques ont un taux sanguin élevé d’un certain gras appelé triglycéride; ces personnes devraient absolument éviter l’alcool car il affecte l’évacuation de ce gras du sang par le foie et encourage ce dernier à en produire davantage. Les études ont démontré que même une quantité modérée d’alcool (2 verres de 4 onces de vin par semaine) peut augmenter le taux de triglycérides.
Boire ou ne pas boire ? Le choix vous appartient. Pensez-y deux fois plutôt qu'une avant de vous servir.

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